Œuvres musicales

Sandeep Bhagwati est l’un de mes plus proches collaborateurs intellectuels et m’a mis au défi de manière ludique en tant qu’intellectuelle, interprète, compositrice et personne. L’un des aspects de ses œuvres que j’apprécie le plus est la créativité dont il fait preuve en offrant aux interprètes une chance de s’exprimer par l’élucidation d’instructions ou d’indices parfois un peu obscurs et toujours très ludiques dans leur interprétation. Préparer et interpréter la musique de Sandeep est une énigme dont la solution est toujours un peu hors de portée, mais qui offre de nombreux aperçus sur nos propres habitudes et nos pratiques.

stars behind stars est une œuvre inspirée par les invitations de Sandeep et les formats de partition inhabituels. Il s’agit d’un jeu musical de 26 cartes, avec des règles pour leur utilisation lors de la performance, ainsi qu’une feuille de repères pour chaque carte. Cette nouvelle œuvre fait référence au travail de Sandeep de plusieurs façons : son œuvre Rives et Dérives utilise également un ensemble de cartes (en plus d’un programme électronique). Le titre, stars behind stars, est tiré d’un passage du roman d’Iris Murdoch, The Sea, The Sea, dont le thème rappelle l’œuvre Archipelago de Sandeep. Celle-ci se compose de 26 courts fragments identifiés par une lettre, donc pouvant être joués en formant des mots.

Pour créer l’interstice entre le monde de Sandeep et le duo Beta Lyræ, stars behind stars prend comme thématique la matière de l’espace, du cosmos, et des ruptures dans celle-ci sous forme de supernovae. Les cartes du jeu font référence à la matière de l’espace (rayons cosmiques, champs magnétiques, poussière, etc.), aux types d’étoiles (naines, géantes, etc.), ainsi qu’aux éléments chimiques qui composent ces étoiles (hydrogène, hélium, etc.). Cinq cartes supplémentaires correspondent aux années où des supernovae (implosion d’étoiles en fin de vie) étaient visibles de la terre sans télescope. Leur visibilité (certaines étaient observables de jour pendant quelques semaines !) était due au fait que ces supernovae résultaient souvent d’une connexion/relation entre deux étoiles, ce qui aurait causé leur fin, souvent mutuelle, en laissant un résidu visible. En combinant ces phénomènes stellaires et la matière de l’espace, stars behind stars nous provoque à considérer une temporalité cosmique, largement au-delà de notre vécu humain.