Erwin Schulhoff
Erwin Schulhoff, né le 8 juin 1894 à Prague, alors en Autriche-Hongrie, et mort le 18 août 1942 dans le camp de prisonniers de Wülzburg (de) près de Weissenburg en Bavière, en Allemagne, est un compositeur et pianiste tchécoslovaque. Enfant prodige, il fut remarqué et encouragé par Antonín Dvořák.
Il est l’auteur de l’opéra Flammen, du ballet Ogelala (probablement son œuvre la plus impressionnante car d’une grande férocité), de plusieurs symphonies, de diverses œuvres de musique de chambre et d'une cantate (opus 82) basée sur le Manifeste du Parti communiste de Karl Marx.
Ses affinités avec le mouvement dada s'affirment dès 1919. Il compose Fünf Pittoresken (Cinq Pittoresques) pour piano, dédiées à Georg Grosz. Quatre d'entre elles empruntent leur titre à la musique jazz. La troisième, intitulée « In futurum », est constituée uniquement de silences, de la pause au seizième de soupir. Elle anticipe de plus de trente ans la pièce 4′33″ de John Cage. En 1919 paraît également sa très courte Symphonia Germanica, qui détourne et défigure l'hymne allemand tout en faisant entendre une version également déformée de La Marseillaise. Suivront la Sonata erotica (1919) pour voix de femme et Die Wolkenpumpe (La Pompe à nuages, 1922).
Ogelala (1925) contient l'un des premiers passages pour percussions seules composé par un musicien occidental. La première pièce de ce type date de 1918 et est signée Arthur Honegger : dans le No. 7 du Le Dit des Jeux du Monde, Honegger avait composé 79 mesures avec bouteillophone, cymbales, grosse caisse et timbales. La « danse du crâne » (Schädeltanz) qu'on entend dans le ballet de Schulhoff précède de quelques années Le Nez, opéra de Dmitri Chostakovitch (1927-1928) et Ionisation d'Edgard Varèse (1929-1931).
Juif, homosexuel, communiste et avant-gardiste, Schulhoff fut une cible de choix pour les nazis, qui le traquèrent et le retrouvèrent avant qu'il ne parvienne à fuir3 en Union soviétique.
Il obtient son visa d'émigration en juin 1941, peu de temps avant l'invasion de l'Union Soviétique et la rupture du Pacte germano-soviétique. Arrêté à Prague par les Allemands, il est déporté à Wülzburg, un camp de prisonniers de guerre, en tant que ressortissant soviétique, ce qui lui permet d'échapper au sort réservé aux Juifs.
Dans le camp, il continue à composer, des œuvres pour piano, mais aussi et surtout sa huitième symphonie, qu'il entreprend d'écrire en hommage à des codétenus massacrés. Il meurt de la tuberculose le 18 août 1942, sans l'avoir terminée. Elle sera retrouvée et publiée par Francesco Lotoro, musicologue italien qui s'est consacré à retrouver la musique écrite dans les camps.
Schulhoff compte aussi parmi les premiers compositeurs classiques à s'intéresser au jazz d'une façon importante.